Rupture – Prospective : Papeteries Darblay – Corbeil-Essonnes 6/7

Résilience

Dès 2006, des visites sont organisées pour les élus sur différents sites européens transformés en éco-quartiers.

Sur ce site historique de la ville Corbeil-Essonnes, il est aisé d’utiliser cette nouvelle réserve foncière. Bouygues propose en juin 2007 un nouveau projet d’aménagement.

Après dépollution du site (3 à 4 millions €), seront créés 875 HLM, pavillons, logements, 3000 m² commerces et restaurants, 1 crèche de 600 m², 1 groupe scolaire. Certains bâtiments historiques devraient être conservés pour faire « cœur de village ».

Après multiples interrogations des citoyens sous forme de débats publics, la proposition initiale des Verts en juin 2004 remporte le consensus (5). La friche industrielle deviendra ECO QUARTIER.

Au final, la mort de ce site industriel remarquable aura duré environ 40 ans.

(5)…La papeterie doit devenir une zone d’activités à haute Qualité Environnementale reliée de nouveau au rail et un lieu d’équipements culturels… Conseil Municipal juin 2004.

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Rupture – Prospective : Papeteries Darblay – Corbeil-Essonnes 5/7

Actions – Réactions

Une première phase d’intervention économique aura lieu de 1970 à 1980. Protestations et soutiens au personnel de la part de la municipalité sont les premiers actes remarqués.

En 1970, suite à une restructuration des filiales (Sopalin et Kleenex quittent le site pour l’usine de Rouen), la sociétété Darblay s’associe à la société Chapelle. Les effectifs passent alors de 3000 à 910 personnes.

En 1975, le groupe est racheté par Paribas. Toutes les usines de la vallée de l’Essonne se regroupent sous le nom d’Everball. On commence à voir apparaître l’activité de récupération, réservée aux papiers cartons et kraft.

En 1977, l’effectif tombe à 353 personnes. Mairie et syndicats s’allient pour investir le site. Sans résultat.

En 1980, il ne reste plus que 260 personnes. Le groupe Chapelle Darblay dépose le bilan.

La vraie première tentative de sauvetage de la papeterie de Corbeil-Essonnes débute alors en 1980 par la reconversion de la machine n°9 (machine qui fit la richesse et la gloire de la papeterie) sur le papier recyclé.

En 1982, décision est prise de commander un rapport. Préfet, député, maire de Corbeil-Essonnes, directeur interdépartemental de l’industrie, représentant du Ministre se réunissent afin de mettre en évidence :

– la volonté du gouvernement de dégager une solution industrielle positive,

– de reconquérir le marché intérieur

– la spécificité de l’usine de Corbeil-Essonnes liée à sa situation en région Parisienne.

Le rapport Mestries sera essentiellement technique et financier. On y trouve une analyse des marchés qui tendra vers une conclusion alarmiste.

Basé sur l’activité nationale de papeterie, le rapport Mestries souligne l’intérêt national de développer en France la fabrication de papier recyclé à usage graphique, la présence d’une telle papeterie s’imposant en région parisienne.

Malheureusement, la création de cette papeterie de recyclé, qui aurait été alors la plus importante en France, n’a pu se faire que parce qu’il existait déjà depuis 20 ans, dans la Région parisienne, à Euregincourt, une autre usine de recyclage, plus modeste, jouant le rôle pilote. Les 2 papeteries bénéficiant d’une direction commune, celle de Corbeil-Essonnes fut temporairement sauvée. Le rapport Mestries attire l’attention sur le fait que la séparation entre les 2 sites serait grandement préjudiciable et pourrait ruiner toute opération de sauvetage de Corbeil (3) .

Jusqu’en 1980, l’action de la municipalité est politique, rappelons que la ville est communiste depuis 1959. Alliance avec les syndicats, pétitions, mobilisation totale de la ville, autant d’actions qu’appuiera le député-maire Combrisson qui interviendra auprès du Ministre de l’Industrie Michel d’Ornano. Celui-ci suggérera la filière Récupération comme moyen d’avenir. Mairie et syndicats refuseront cette solution jusqu’à la publication en 1983 du rapport Mestries, ils préfèrent la production de pâte à papier neuve.

En 1986, Soucieuse de mettre en place les recommandations « filière récupération » du rapport Mestries, la municipalité de Corbeil-Essonnes met en place un montage financier à travers la Société Anonyme d’Economie Mixte la S.A.I.E.M. ; afin que cette dernière acquière des terrains appartenant autrefois à Darblay. Une partie sera restituée à la papeterie pour qu’une certaine activité perdure, une autre partie verra l’installation de petites PME-PMI.

Au final, tous les projets péricliteront, et le site papetier sera abandonné en 1996.

Entre temps, le site aura vu le commencement de sa démolition dans les années 70-80. Des écoulements d’hydrocarbures et de pyralène dans la rivière Essonne sont enregistrés. Un enfant meurt en tombant d’un toit, la mairie est accusée de non-surveillance. Des ouvriers chinois démantèlent de façon illégale le site. Un homme d’affaires est arrêté pour banqueroute frauduleuse.

En 2004 la papeterie fantôme est enfin vendue (4). La mairie en rachetant le site, aux enchères, est enfin maîtresse de son devenir. Ce ne sont plus que 12 ha qui sont en jeu.

En 2006, Bouygues Immobilier acquiert le site. C’est la fin de très nombreuses années d’imbroglios financiers. Et le début d’une possible résilience.

(3) Rapport Mestries, mars 1983

(4) Le Parisien -28 octobre 2004

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Rupture – Prospective : Papeteries Darblay – Corbeil-Essonnes 4/7

Profondes mutations

Jusque dans les années 60, Corbeil-Essonnes va résister à l’attraction de la capitale, forte de son industrialisation et de sa position primordiale au sein du département.

Tertiaire

La création des nouveaux départements en 1968, puis celle des Villes Nouvelles en 1970, font perdre une majeure partie de son secteur tertiaire à Corbeil-Essonnes au profit d’Evry, qui devient Préfecture, où le Tribunal déménage, où les sièges sociaux des banques s‘installent.

Secondaire

La crise économique atteint de plein fouet la ville dans son secteur industriel, celle-ci bénéficiant d’industries de dimension économique nationale, voire internationale. Pour rappel, 1970 enregistre une hausse de 50% du coût du fuel.

Le système d’infrastructures est tel que toutes les industries semblent interdépendantes : l’énergie fournie par l’eau des moulins alimentent les générateurs de certaines usines, les voies de communications sont nombreuses, tant fluviales (Seine), ferroviaires (2 lignes), routières et autoroutières, que aériennes (Orly à 15 km).

La durée de la crise fut telle que les pouvoirs publics nationaux et locaux se penchèrent sur le cas de la papeterie Darblay, et pendant 16 ans, toutes les industries, impliquées par une éventuelle faillite des Papeteries, mobiliseront leur force de cohésion.


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Rupture – Prospective : Papeteries Darblay – Corbeil-Essonnes 3/7

Histoire

Corbeil-Essonnes , ancienne préfecture de l’Essonne, chef-lieu de canton, fruit de la fusion des villes de Corbeil et Essonnes le 4 août 1951, occupe aujourd’hui 1101 hectares et compte 41 604 habitants.

Sa situation au confluent de la rivière l’Essonne et de la Seine a, de tous temps, permis un développement industriel et commercial important.

Qui dit eau, dit moulin, et c’est dès mars 1340 que les premiers anciens moulins à blé sont transformés en moulin à papier. Ce sera le début d’une industrie essonnienne tournée vers la production de papier. Au 16ème siècle les papeteries d’Essonne fournissent l’Université de Paris. La manufacture est rachetée en 1784 par les frères DIDOT qui la transforment en usine, en mécanisant le travail(invention de la machine à papier continu). Sous la révolution elle fournit le papier des lois et des assignats.

En 1866, Aimé Darblay achète une papeterie qui, avant d’être en faillite, était la plus importante de France.

A cette grande époque de concentration verticale, chaque usine comporte tous les ateliers nécessaires à sa survie – nul besoin de sous-traitance, même pour les réparations de tous ordres.

La papeterie disposait alors de sa propre fonderie, atelier de peinture, etc. Les visites étaient nombreuses, les invitations fréquentes, et chaque ouvrier était fier de l’image qu’il donnait de l’usine où il travaillait.

La direction de la papeterie, axée sur un paternalisme ouvert et humain, prodiguait une politique sociale offrant différents avantages à ses ouvriers, tels la construction de logements, une école, une chapelle, un dispensaire, et plus tard, une caisse de secours et un économat. En 1873, une grande cheminée fut construite pour éviter les pollutions par fumée, et en 1875, l’eau de la Seine fut amenée aux habitats, puis l’électricité installée.

La famille Darblay avait ainsi créé une ville dans la ville. Propriétaire également des Moulins de Corbeil, elle bénéficiait de son propre port privé sur la Seine. Les mouvements quotidiens de batellerie y étaient si importants qu’une cantine attitrée au port fut érigée. Afin de ne pas gêner la circulation en ville, et ne pas la faire traverser aux attelages dans un premier temps puis aux camions dans un second temps, une voie de chemin de fer de 1,5 km fut construite du port à la papeterie, passant sous la ville d’Essonnes. Au final la SNCF créera un embranchement raccordé au réseau intérieur de 12 kms de voies ferrées desservant les industries DARBLAY.

En un siècle, les papeteries Darblay passeront d’une production de 3000 Tonnes de papier à 233400 Tonnes., transformant totalement le paysage écologique, urbain et social.

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